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  • 7 oct. 2018

    La voie des Oracles, tomes 1 à 3 (fin) de Estelle Faye


     Auteur : Estelle Faye
    Éditeur : Folio SF (2017-2018)
    Genre : Fantasy
    Pages : 360 pages (formats poche)

    Lus dans le cadre du « Pumpkin Autumn Challenge »

    Le résumé du tome un : Thya est la fille de Gnaeus Sertor, général romain et héros de l'Empire. Mais Thya est aussi une Oracle, peut-être la dernière élue capable de démêler les fils de l'avenir. Elle est donc contrainte de se cacher en Gaule, au fin fond de la forêt d'Aquitania car, à Rome, comme partout ailleurs dans l'Empire, les chrétiens règnent en maîtres et font impitoyablement la chasse aux adorateurs des dieux anciens. Mais lorsque son père est laissé pour mort par des Pictes, Thya n'a plus d'autre solution que de fuir vers le nord pour suivre une étrange vision dans laquelle son père est toujours en vie.

    Ma chronique :  Autant être franche, s'il n'y avait pas eu le Pumpkin Autumn Challenge, La voie des Oracles, tome 1 : Thya ne serait pas sorti de ma bibliothèque avant un petit moment. Ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien. Ce que je sais, en revanche, c'est que je bénis ce challenge d'avoir un poil forcé ma main, car un bon gros coup de cœur comme je n'en avais plus eu depuis longtemps en Fantasy était à la clef. Un coup de foudre littéraire qui m'a réconciliée avec Estelle Faye dont le lecture de Porcelaine m'avait un peu déçue.

    En empire romain d'occident, au Vième siècles après J.-C, le déclin de Rome se profile. Les peuplades barbares menacent l'empire comme jamais auparavant, les cultes païens reculent sous l'influence grandissante du christianisme, et les créatures et dieux mythologiques se font rares et discrets, tout comme les Oracles, enfants d'Apollon et du Destin. Depuis l'apparition de ses dons d'oracle, la jeune Thya grandit seule, préservée des chrétiens par son père dans une villa d'Aquitania, loin de Rome et du danger qu'il représente pour elle. La vie là-bas est simple, et il ne s'écoule pas un jour sans que Thya n'exerce ses talents. Mais tout bascule lorsqu'une vision lui révèle le corps de son père criblé de flèches, suivie d'une autre, en la citadelle nordique de Brog, où Thya l'aperçoit bien vivant. Sans y réfléchir plus avant, Thya s'élance pour la première fois de son existence sur les routes, persuadée qu'en rejoignant la lointaine forteresse, elle sauvera son père. Un périple dangereux pour elle dont les dons de sorcière effraient la chrétienté, et dont l'indépendance interpelle son frère qui n'a dès lors de cesse de la pourchasser. Mais si sur la route l'attendent effectivement des dangers, des alliés humains et fantastiques se révèlent à elle ; et bientôt la quête prend un tout autre sens.

    La voie des Oracles d'Estelle Faye est une trilogie dont je me souviendrai longtemps, et avec beaucoup d'émotion. D'abord parce qu'elle se situe à une époque qui me passionne (et qui en passionne beaucoup d'autres, d'ailleurs) ; et ensuite parce qu'elle emploie la culture romaine et sa mythologie à la perfection, avec de l'humilité et du cœur. Oubliez tous ces récits maladroits, cinglant la mythologie grecque, romaine et celte à grand renforts de quêtes ridicules (coucou Percy Jackson) ; et plongez dans La voie des Oracles pour découvrir la magie, la vraie. Celle que vous sentez agir en contemplant des paysages à couper le souffle, celle qui vous touche profondément et vous chante presque à l'oreille les merveilles du monde. En toute franchise, j'ai été aussi bouleversée par la beauté de La voie des Oracles d'Estelle Faye que par Un bûcher sous la neige de Susan Fletcher (chronique par ici). Il se dégage des deux une forme d'ode à la nature et de respect séculaire qui, personnellement, m'a touchée en plein cœur

    Ceci dit, tout n'est cependant pas beau, dans La voie des Oracles. Le récit se fait parfois dur, réel voire presque cruel envers ses protagonistes. Un rappel à l'ordre de l'auteur envers le lecteur que si les divinités se rient parfois des mortels, elles ne le font pas en toute bienveillance.

    « Il abaissa son capuchon, ouvrit son second regard, ses yeux plus durs et plus froids, qui observaient et jugeaient sans concession le monde. Alors il vit la scène telle qu'elle était vraiment. Il vit la villa en ruines (...). Il vit les danseurs et danseuses, hâves, épuisés, la peau sur les os, les pieds en sang à force de farandoles, tenir encore debout pour la seule volonté du dieu dément (...). Les fifres aux lèvres crevassées et suintantes soufflaient dans leurs instruments autant de bave rouge que d'air. Les doigts des joueurs de cithare étaient couverts de cloques et d'ampoules crevées, un sourire exagéré leur tirait le visage en un masque grotesque. Les mains martyrisées pinçaient à une vitesse inhumaine les cordes, obligeant les danseurs à accélérer le rythme, à accélérer toujours plus ... »

    Mais avant tout, ce sont les Hommes qui font La voie des Oracles, pas les dieux. Et contrairement aux récits de fantasy plus traditionnelle riches en protagonistes, Estelle Faye se contente, elle, d'en développer quatre. En premier plan, bien évidemment, il y a Thya. Guère plus qu'une adolescente déterminée et mature en début de récit, mais tellement plus lors de sa conclusion qu'elle en force le respect et l'admiration. Car Thya traverse une quantité d'épreuves surprenantes et n'a que sa détermination, son intelligence et son cœur à leur opposer. Elle est intègre, droite et fière, et ne se dérobe pas un instant à ses responsabilités. Une jeune fille comme on rêverait d'en être et dont l'indépendance permet d'ailleurs à l'autrice d'introduire certaines réflexions quant au statut de la femme au sein de Rome.


    « L'Empire était à leur portée. Ils n'avaient qu'à tendre la main ... Et à balayer les menus obstacles en travers de leur route. Comme cette Thya et sa quête absurde de Brog. Quoique... Thya n'était qu'une femme, la tuer ne serait pas nécessaire. Il suffirait de la marier. »

    Ainsi, bien loin d'épargner ses héros, Estelle Faye les fait grandir à travers les épreuves qu'ils traversent. Enoch, le petit maquilleur de province, se révèle  être bien plus qu'il n'y paraît, et surtout bien plus que lui ne le pense. Un discours qui m'a charmée, démontrant que la valeur ne se mesure pas à la force du bras (et croyez-moi, ça fait du bien de l'entendre quand on est habitué aux guerriers légendaires typiques de la fantasy). Viennent enfin Aylus et Aedon. Deux tomes durant le lecteur apprend à les connaître, à les aimer ou les haïr, pense les avoir cernés ... et se retrouve sur les fesses lorsque arrive le troisième volume, déroutant de possibles et fort en questionnements.

    De quoi s'interroger sur soi et sur chacun, sur ce que nous pourrions être ou aurions pu être « si » ... 


    Enfin, outre la claque littéraire et émotionnelle, La voie des Oracles est un voyage extraordinaire à travers le monde. Le récit commence effectivement en Aquitania, mais n'y demeure pas longtemps. En compagnie de Thya et d'Enoch, j'ai traversé l'Europe du Vième siècle de l'empire romain d'occident en passant par les contrées les plus inexplorées de Gaule et de Germanie, poursuivi ma route vers Byzance puis le Moyen-Orient dont l'empire sassanide était jadis maître, pour finir chez les Pictes de Britania. A de nombreuses reprises j'ai posé mon récit, ouvert mon ordinateur et cherché à comprendre. Où j'étais, à quelle époque, sous quel empire, sous quel régime ? Et ça, cette curiosité à laquelle Estelle Faye incite ses lecteurs, ça n'a pas de prix.

    Une trilogie à découvrir sans plus tarder, donc, surtout pour les amateurs de mythologie, de récit surprenants et remarquables, et de voyages au cœur même de la nature. Une chose est sûre me concernant : je ne lâche plus Estelle Faye d'un pied !




    Note : 19/20

    Date : 17 septembre 2018 - 04 octobre 2018

    3 commentaires:

    1. J'avais bien aimé le 1er tome, il faudrait que je continue la série !

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      1. Tu verras, le deux et le trois sont bien différents ! Chacun a son propre style, mais QUEL style ! :-)
        Bonne lecture !

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    2. C'est une excellente trilogie, je ne serais pas contre la relire un de ces jours ^^ En tout cas, c'est qui m'a donné super envie de lire les autres romans de l'autrice comme Les nuages de Magellan ou encore Les révoltés de Bohen.

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