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  • 17 oct. 2021

    Symphonie atomique d'Etienne Cunge - Dystopie écologiste, thriller anticipatif

    Auteur : Etienne Cunge
    Editeur : Critic
    Genre : Dystopie, post-apo, science-fiction, thriller
    Pages : 428 (grand format)

    Résumé : «N’oubliez pas notre baseline : soyez écoresponsable, suicidez-vous.»

    Le monde d’après s’effondre. Malgré l’odeur de fin des temps, des restes de civilisations subsistent, au bord du chaos, et chacun lutte pour donner du sens à sa vie. Les quatre modèles des puissances atomiques, aux abois, dominent cette désolation et se confrontent, prêts à en découdre : ultra-capitalisme américain, écologisme européen, nationalisme russe et totalitarisme social chinois. Dans ce climat délétère, l’équilibre ne tient plus qu’à un fil, sur le point de rompre. Parmi le concert des forces nucléaires spatiales, l’Europe en Transition fait figure de naine. Pour autant, alors qu’émerge une crise dans la crise, le sort de l’Humanité va peut-être dépendre des décisions de deux de ses membres, que rien ne prédisposait à cela : Juan et Agathe. Dans cette nouvelle ère, à l’Europe reconfigurée et où l’espace constitue le terrain névralgique des conflits, leurs actes vont faire écho à l’étrange soulèvement en cours dans les steppes d’Asie centrale – sous le commandement du jeune Ashkat –, et les confronter à l’énigme qu’incarne Ulan Moltov, l’âme de la rébellion, le cœur du jeu de poker à grande échelle qui débute..

    Chronique : Aujourd'hui est un grand jour dans l'histoire du blog : pratiquement 4 ans après sa création, voici le premier service presse de Choupaille ! Tambours, trompettes et tapis rouge, accueillons chaleureusement le titre que vous avez la possibilité de vous arracher en librairie depuis le 1er octobre (et que j'ai eu l'immense plaisir de recevoir de la part des Editions Critic, un grand merci à eux !), j'ai nommé Symphonie atomique d'Etienne Cunge. Un titre poétique pour une dystopie écologiste explosive – comptez quelques centaines d'ogives nucléaires au bas mot. Poétique, oui oui.

     

    En 54 après l'Effondrement (soit un futur pas si lointain, l'auteur nous colle déjà la pression), la Terre est ravagée par cinq fléaux quasi bibliques, conséquence directe du dérèglement climatique. Le cycle carbone est rompu, les pandémies et super tsunamis sont légion et les ressources primaires particulièrement disputées. Sur cette Terre désolée règnent quatre grandes puissances : l'Amérique ultra-consumériste, la mère patrie russe, l'Empire chinois aux pratiques sociales douteuses (après la politique de l'enfant unique, je vous laisse deviner la pépite qu'ils ont pondu) et l'Europe en Transition. L'état d'urgence climatique et les plaies associées ont fait éclater les petites nations au profit de ces quatre géants lourdement armés, mais seulement dans l'espace : on ne tolère plus ni Fat Man ni Little Boy sur le plancher des vaches. Une multitude de têtes nucléaires est ainsi répartie en quatre stations orbitales (une pour chaque puissance, si vous êtes bons en math), de sorte qu'il règne au XXIIe siècle un climat hyper pesant : celui d'un équilibre de la terreur – comprenez que tout le monde est prêt à faire péter le feu sur votre tête au moindre accrochage, mais que personne ne souhaite frapper le premier (question d'image). Bref les puissants sont tendus dans une bonne grosse ambiance de merde, et si quelques accords commerciaux de bon voisinage subsistent (il faut bien boire, Michelle), il n'empêche que c'est méfiance à gogo. Et au beau milieu de tout ça, il y a Radio Collapse qui vous colle sa baseline dans les oreilles : "Soyez éco-responsable, suicidez-vous".

     

    Tu le sens, le récit engagé et le bon gros bordel qui arrive ?


    On ne va pas se mentir, elle est vachement accrocheuse cette baseline de Radio Collapse. Je parie même que rien qu'à la lire, vous en avez l'eau a la bouche, non ? Hé bien vous devriez. Car Symphonie atomique est certes de ces romans climato-engagés, mais pas de ceux qui vous donnent envie d'en arracher les pages pour vous tailler les veines avec. Le récit est bien dosé et se définit moitié éco-engagé donc, mais aussi moitié thriller-SF. Lorsqu'une frappe nucléaire inconnue démonte trois stations orbitales sur quatre, je vous assure que le compte à rebours est lancé pour l'Humanité : les nations s'accusent les unes les autres et Juan et Agathe, nos deux héros principaux, ont un jour voire deux grand max pour déjouer les plans du vilain Rob Callway (qu'on hésitera à cataloguer en misanthrope ou philanthrope). Juan devient rapidement et par la force des choses le commandant d'Esperenza, la station orbitale européenne, et y opère comme il peut pour limiter la casse (1) et ne pas se faire des ennemis des équipages voisins (2). Agathe est quant à elle une cinquantenaire  des services spéciaux européens (yes, enfin un quinqugénaire sur les devants de la scène SFFF !) dont la tâche sur Terre sera de démêler les fils de cette grosse pelotte. Ella a plus d'un tour dans son sac, quoique que je regrette qu'on ait pas eu un plus large aperçu de ses capacités de super-espionne. Ni l'un ni l'autre ne se connaissent et pourtant si le salut existe, c'est par eux qu'il transite. Rob Callway, de son côté, est à la tête de Ziusudra (je vous laisse faire vos recherches sur ce nom, moi c'est fait), un programme développé par les riches pour les riches leur assurant un avenir dans le monde d'après - car l'Effondrement total de l'Humanité se profile et que ce serait quand même dommage de crever, surtout quand on a de la thune. Or l'Effondrement est compromis par l'équilibre fragile régnant entre les quatre surpuissances mondiales. Un équilibre tellement fragile, en fait, que notre petit Rob ne résiste pas à l'idée d'y mettre son grain de sel dans le but de faire prospérer Ziusudra, sa ville du futur, sur les cendres des nations atomisées. J'ai trouvé ce personnage bordeline extra. Pour poursuivre et clore la liste des personnages qu'on aime ne pas aimer, il y a le Seigneur de guerre Ashkat et les dirigeants américain, russe, chinois et européen qui prêtent leur voix à quelques chapitres. Symphonie atomique est thriller spatial aux gros enjeux ; on y croise des bons, des brutes et des truands et sa classe politique (dont on adore suivre les palabres interminables et faux-semblants) appartient sans conteste à ces derniers. Les portraits brossés sont très variés et réussis, mais manquent parfois un peu de piquant.


    Et derrière tous ces protagonistes se cache le plus important de tous : l'Humanité débordante de combativité et de résilience, en lutte pour sa survie.


    Le roman se fait donc chorale et laisse voix au(x) chapitre(s) à une belle brochette de copains. Les points de vues s'entremêlent en une toile bien pensée : le thriller est aussi bien construit que l'univers dans lequel Etienne Cunge le plante. J'ai apprécié la tension et le suspens du contre la montre apocalyptique (vite, trouver le responsable de la frappe nucléaire fantôme avant que les Quatre en viennent aux mains !), mais ce qui m'a franchement plu dans Symphonie atomique c'est avant tout son contexte climato-politico-social ultra difficile (ça fait beaucoup de points à aborder, et pourtant ça passe crème). Pas de digressions inesthétiques et lourdasses pour planter le décor de cette dystopie engagée ; Etienne Cunge distille les facettes de ce monde crado en chaque début de chapitre en nous offrant des extraits triés sur le volet de Radio Collapse. L'émission douteuse brosse un portrait de la Terre alarmant et qu'on espère ne jamais voir se concrétiser, mais pour autant, le livre est équilibré: il est anticipatif, alarmiste juste ce qu'il faut mais pas déprimant. Il y a de l'espoir et l'Europe en Transition l'incarne vaillamment malgré une démocratie totalitariste bien pensante.


    Symphonie atomique est la tête d'affiche du moment des éditions Critic et je comprends pourquoi. Amoureux de la SF, je vous le recommande. Amateurs de thrillers menés tambours battant, vous pouvez y aller également ; on touche ici pas mal de publics ! Et pour ceux qui aiment les œuvres engagées mais pas trop lourdes, le feu est vert pour vous aussi. Bref, aucune excuse de ne pas mettre la main sur ce roman !


    Note : 16/20


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