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  • 7 mai 2019

    Les révoltés de Bohen de Estelle Faye - Talkin' 'bout a revolution

    Auteur : Estelle Faye
    Éditeur : Critic
    Genre : Fantasy
    Pages : 733 (grand format)

    Lu dans le cadre du « Mois de la Fantasy »

    Le résumé : « J'avais sept ans lorsque les insurgés ont renversé l'Empire, lorsqu'un vent de liberté et d'espoir a secoué jusqu'au tréfonds de notre trop vieux monde. Je sais, maintenant, que le drame était déjà là, en germe, dans les toutes premières heures de la révolution... Aujourd'hui les golems immobiles se dressent aux portes de l'ancienne capitale, et des prédicateurs errants nous promettent le retour prochain des Wurms, des anciens dragons d'ombre qui autrefois asservissaient les humains. Je ne vais pas vous narrer le combat glorieux de la Révolution triomphante, car ce combat-là n'a jamais eu lieu. Les héros parfaits n'existent que dans les bylines, et les insurgés n'étaient jamais que des hommes. En revanche, je vais vous raconter comment nous avons continué à y croire, même dans les heures les plus sombres, même quand nous n'avions plus d'espoir. Comment nous n'avons jamais abandonné. »

    Ma chronique : Madre de dios, ce fut bon de retourner en Bohen sur des airs à la Tracy Chapman, mais ce fut aussi et surtout très long ! Les révoltés de Bohen, comme son nom l'indique, c'est sept cent pages de révolte dense qu'il faut savoir mastiquer et digérer, même si ça fait franchement du bien quand ça vous passe dans le gosier. Retour sur une lecture sans fin ou presque et qui, je vous l'annonce d'emblée, n'est pas à mettre dans des mains demandeuses de fantasy à l'ancienne. Pour le reste par contre, on est sur du très, très bon !

    L'ancien empire de Bohen n'est plus. La révolution populaire l'a mis à mal quinze années auparavant, mais en lieu et place de la république tant attendue c'est un empire d'une autre forme qui a pris sa place. Un empire au pouvoir plus écrasant encore et bien décidé à mater les quelques révolutionnaires usés qui se battent encore pour le salut du peuple de Bohen. A Serna Chernik, Andreï lutte contre le Régent et la princesse Yule, déterminés à rappeler en ce monde une odieuse civilisation disparue. Dans les marais de Bo Chaï, Sigalit, la Voix de la Révolution qui portât jadis le peuple au plus haut, vit prisonnière de regrets et de désespoir. Sur les côtes déchirées des Havres, la morguenne Lantane commandant aux vents et aux marées sent l'océan charrier souvenirs et amours perdus alors que par la terre, c'est l'enchanteresse la plus puissante de Bohen qui s'en vient chercher du soutien au nom d'une révolution désemparée. Quinze années après un premier soulèvement, le vent finit par tourner et éveille les derniers révoltés de Bohen.

    De la patience, un coin tranquille où lire, des souvenirs plus ou moins exacts du stand-alone précédent d'Estelle Faye : voici la recette pour un bon moment à passer en la compagnie des Révoltés de Bohen. De ces trois éléments j'en avais un : le coin pépère pour bouquiner. Pour le reste il a fallu que je carbure à plein méninges, et ç'a été plutôt tendu sur le début pour prendre mon pied. Le roman ne se déguste pas à l'improviste, il faut une base solide d'acquis et une bonne connaissance préalable de Bohen pour le savourer à fond. Tome deux ou stand-alone, difficile de trancher et de coller une étiquette aux Révoltés de Bohen. Le récit tient la route tout seul mais nécessite de grosses piqûres de rappel qu'il faudra malheureusement vous administrer seul - Estelle Faye aura mieux à faire que de vous prendre par la main.

    Et par mieux, j'entends développer un univers qu'on ne demandait justement qu'à connaître davantage à la fin des Seigneurs de Bohen, et toute l'Histoire qui va avec. On l'attendait, Estelle Faye l'a fait : renouer en un roman avec Bohen et ses révoltés c'est en apprendre enfin davantage au sujet des Wurms, de leurs redoutables dracs et cités englouties ; mais c'est aussi le plaisir de voir se lever le voile sur un personnage hors normes et bourré de piquant : l'énigmatique Mordred - avouez, c'est votre personnage préféré à vous aussi ! De nouvelles pistes se creusent et Estelle Faye fonce dans la brèche pour offrir un récit mythique fait de civilisations anciennes et de révoltes populaires, où chaque petit geste compte. Action et magie surgissent par touches épiques quand on s'y attend le moins, et dans l'intervalle ce sont les rouages silencieux communs aux grandes révolutions qui focalisent l'attention. 

    De quoi avoir comme une rengaine en tête de la première à la dernière page : « Don't you know, talkin' 'bout a revolution sounds like a whisper ... ».

    Il y a donc de la maîtrise du côté des Révoltés de Bohen, une touche de Gemmell même, par-ci par-là, mais aussi et surtout une bonne grosse dose d'humanité. Les codes de bien-pensance sont fracassés, piétinés en un roman qui s'adresse à toutes et tous et où toutes et tous, justement, s'illustrent et brillent de leur différence. Les révoltés de Bohen est un récit de Fantasy révolutionnaire, mais également un roman d'amours au pluriel et de libertés en tout genres. On envoie valser les conventions et ça fait un bien fou. Estelle Faye ne passe cependant pas loin du too much avec un Wenz dont j'ai peu apprécié la façon d'être, mais vu la flopée de protagonistes réussis qui virevoltent tout autour, on passe au-delà sans le moindre problème. Liberté de culte, liberté d'aimer, égalité des sexes : c'est un maelstrom d'idées pas si nouvelles qui déferle en Bohen, porté par des personnages inébranlables. Et ça, mes amis, c'est la cerise sur un gâteau déjà bien garni !

    Il faut donner du sien pour venir à bout des Révoltés de Bohen. C'est dense, c'est exact, c'est bien ficelé ; bref ça demande de l'implication. Si vous ne vous sentez pas d'attaque pour l'aventure, ne la tentez pas - surtout si Les seigneurs de Bohen dort toujours au fond de votre PAL. Mais si en revanche vous vous levez d'un pied de baroudeur en quête de bonne fantasy bien humaine et flairant bon la tolérance, alors craquez sans hésiter. Prenez le temps, dégotez-vous un coin sympa où vous poser - moi, c'état les côtes bretonnes hé hé - et y a plus qu'à !

    Note : 16/20

    Date :  22 avril 2019 - 02 mai 2019

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