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  • 27 déc. 2018

    La Volonté du Dragon de Lionel Davoust

    Auteur : Lionel Davoust
    Éditeur : Critic (2010)
    Genre : Fantasy
    Pages : 165 (grand format)


    Le résumé : Entre les derniers royaumes libres et les forces d’invasion de l’Empire d’Asreth se dresse l’imprenable Qhmarr, petit pays à peine sorti de l’ère médiévale. Gouverné par un roi trop jeune et un conseiller trop confiant, il ne devrait représenter dans le plan de conquête de l’Empire qu’une note de bas de page. Et alors que le généralissime D’eolus Vasteth s’emploie à négocier les modalités d’une reddition diplomatique, déjà, aux portes de la capitale, se presse l’implacable armada... La conclusion du conflit ne fait aucun doute. D’une manière ou d’une autre, Qhmarr passera sous pavillon asrien. Pourtant, malgré la défaite annoncée, Vasteth découvre des dirigeants qhmarri inflexibles, prêts à confier le destin de leur nation à d’absurdes croyances ancestrales. À travers le défi lancé par l’enfant-roi, ce sont toutes les certitudes du généralissime qui vont se voir ébranlées, tandis que, sur la mer, les soldats meurent, simples pions sur un échiquier qui les dépasse...


    Ma chroniqueIl a pas l'air comme ça le filou, mais celui-là je l'ai cherché diablement longtemps ! Aujourd'hui réédité par les éditions Critic, Dieu seul sait que j'ai fureté pendant un bon moment avant de le trouver d'occasion ... et dédicacé ! Ouais, pas à moi, mais est-ce vraiment important ?! Lionel Davoust et son monde Evanégyre m'étant particulièrement chers, non, je décrète que ça ne l'est pas, et s'il était inconcevable que je passe à côté de La Volonté du Dragon, à présent il est inconcevable que je m'en sépare. Venez plus près, je vous explique pourquoi.

    L'empire d'Asreth a dompté la magie dont est emprunte la dranaclase, une roche renfermant des quantités d’énergie insoupçonnées. Il en alimente ses armes hautement technologiques et meurtrières et a achevé d'annexer grâce à elles les royaumes voisins. A présent, c'est vers le Grand Sud, ultime pan d'Evanégyre non pacifié par l'empire du Dragon que se tourne ce dernier, en commençant par le pays de Qhmarr, pied-à-terre idéal de ce continent inconquis. Mais la paix d'Asreth a un prix, celui de la reddition sous peine d'annihilation. Fort d'une flotte de terribles cuirassés armés de la proue à la poupe, l'empire n'a guère pour habitude que l'on se dresse sur son chemin. Pourtant, la froide assurance des dirigeants qhmarri laisse perplexe le généralissime D'eolus Vasteth, chargé de négocier la reddition de Qhmarr. Car à en croire les qhmarri, c'est l'empire asrien qui risque gros à s'aventurer sur la voie martiale, et non l'inverse. Invité à disputer une étrange partie d'échecs alors que débute le conflit, D'eolus Vasteth prend la pleine mesure de l'orgueil de son empire et de l'étendue de son ignorance... Et si la partie qu'il disputait scellait le sort de la bataille ?

    De la personnalité, de l'originalité et de la gueule : les romans de Lionel Davoust sont de vraies pépites, et laissez-moi vous dire que celui-ci ne fait pas exception ; non non non. Car en  plus de s'intégrer à un univers fantasy très développé pour qui a déjà lu les précédents romans de l'auteur - ça, on en parle juuuste après - La Volonté du Dragon est riche en réflexions et en émotionsA sa lecture on est immanquablement touché par certains passages dont la sincérité tranche avec le contenu martial du récit ; une véritable touche d'émotion inattendue quand ce n'est pas simplement la pertinence du propos qui saisit. Soyez toutefois avertis, la lecture de La Volonté du Dragon n'est pas facile. Il faut du temps et une certaine volonté pour venir à bout de ses cent soixante pages, mais quel bon temps ! Le vocabulaire naval qu’emploie Davoust est exact, les tournures travaillées et les néologismes nombreux mais, paradoxalement, c'est cette complexité qui séduit. Personnellement je me suis encore une fois sentie plongée corps et âme dans l'univers d'Evanégyre, et toute curieuse que j'étais d'en découvrir davantage au sujet de l'empire d'Asreth, je n'ai pas vu le temps passer. 

    Et dans ce court roman, justement, c'est l’orgueil d'Asreth qu'on découvre avant tout. Des siècles avant Les dieux sauvages, un bon millénaire avant Port d'âmes, Lionel Davoust dévoile dans ce roman l'empire asrien tel qu’il fut à son apogée, bien avant que le grand dieu Wer ne déchaîne sur lui sa fureur. En un large clin d’œil à son homologue romain, l'auteur dépeint un empire orgueilleux, ambitieux, unificateur et conquérant sous couvert de pacification - à coup sûr ce qui précipita sa perte - et c'en est presque jouissif de sentir le roussi qui se profile. L'impression d'un empire proche du déclin est d'ailleurs d'autant plus saisissante que Lionel Davoust lui choisit ici un opposant modeste à la spiritualité révérencieuse ; l'occasion pour lui de révéler le gouffre d'ignorance dans lequel patauge l'empire technologique et de préparer gentiment le terrain à l'apocalypse qui s'annonce. Un régal pour les amoureux d'Evanégyre - même ceux qui s'ignorent encore, oui, ceux-là aussi - ... mais un petit goût de trop peu malgré tout. 

    Car sachez-le, si vous cherchez des réponses aux innombrables questions qu'introduit l'auteur dans ses précédents romans - au sujet de la chute de l'empire d'Asreth tout particulièrement - , vous serez un poil déçu par La Volonté du Dragon. En effet ce dernier se centre résolument sur le déroulement d'une bataille, une seule, plutôt que d'offrir une vision globale de l'empire et de sa déchéance. Un mal pour un bien d'une certaine façon, puisque qu'en ne s'embarrassant pas de détails on finit par cerner avec une grande clarté la folie des grandeurs fatale qui anime Asreth. Quoi de mieux que de la baston pour y voir clair, hein ?  Je m'étais attendue à autre chose, à une immersion plus franche dans la mécanique d'Asreth, mais finalement je ne regrette pas la tournure du récit. Il y a quantité de rouages à saisir et autant de leviers à actionner dans le grand bazar qu'est Evanégyre, et à voir le tout se gripper inexorablement sous l'action d'infimes grains de sable, je suis tombée sous le charme. La volonté du Dragon est un levier qui joue son rôle et s'y borne : apporter quelques menus éclaircissements entre deux-trois coups de toucher-couler bien violents.


    Davoust propose un David contre Goliath en plein monde d'Evanégyre ; mais pour la chute d'Asreth à proprement dite, il faudra attendre un autre roman  ~ laissez-moi croire que c'est au programme, pitié !

    Ça ne regarde que moi mais si vous n'êtes pas encore familier de l'auteur et de son univers, je vous déconseille gentiment de débuter par ce roman. Non pas qu'il soit mauvais - je vous raconte justement tout le contraire depuis un moment, mais oui ! - simplement il n'est pas des plus digestes pour qui n'a pas encore derrière lui cet amour d'Evanégyre, cette curiosité maladive et cette volonté de savoir à tout prix. A titre personnel, je les ai acquis lors de ma lecture des Dieux sauvages, un récit de fantasy post-apocalyptique de haut vol dont le scénario poignant et original offre davantage que celui de La Volonté du Dragon. L'épopée de Mériane vous attend : sautez du tremplin et sombrez dans une histoire pas bien loin de rappeler celle d'une certaine Jeanne d'Arc. Pour le reste, les réponses que je cherche se trouvent certainement dans un autre roman (à paraître ou déjà paru) et je compte bien persévérer. Inarrêtable je suis ! et ce sera pour moi l'occasion de poursuivre ma découverte de ce monde grandiose en toute bonne conscience littéraire - d'autant que le troisième tome des Dieux sauvages pointe le bout de son nez, alors pourquoi se priver ?

    Bref, je ne sais plus en quelle langue vous le conseiller : lisez Lionel Davoust ! Sinon la prochaine fois, je tente le Polonais.


    Note : 17/20

    Date : 23 décembre 2018 - 26 décembre 2018

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