Auteur : Victoria E. Schwab
Éditeur : Lumen (2018)
Genre : Fantasy, Young Adlut
Pages : 761 pages (grand format)
Cette chronique peut contenir des spoilers des tomes précédents !
Lu dans le cadre du « Pumpkin Autumn Challenge »
Cette chronique peut contenir des spoilers des tomes précédents !
Le résumé : Un autre monde vous attend, là, de l'autre côté du mur... Kell est un magicien de sang, un sorcier capable de voyager d'un monde à l'autre. Des mondes, il y en a quatre, dont Londres est, à chaque fois, le cœur et l'âme. Le nôtre est gris. Le deuxième, rouge, déborde de magie. Dans le blanc, elle s'est faite bien trop rare quand, dans le noir, elle a tout dévoré. Et le fléau s'apprête à contaminer chacun des univers jusqu'au dernier – ce n'est plus qu'une question de temps... Car les ténèbres ont déjà commencé à s'étendre sur le flamboyant Londres rouge. Les habitants en sont réduits à choisir entre céder aux sirènes dévastatrices de la magie et entamer contre elle une lutte désespérée jusqu'à la mort. Si Kell semble immunisé contre le poison qui gangrène son royaume, la fin le guette, lui aussi... à moins que des alliés inattendus ne le rejoignent dans la bataille. À commencer bien sûr par Lila, qui ne raterait pour rien au monde une occasion de partir à l'aventure et faire étalage de sa puissance. Mais, aussi intrépides qu'ils soient, comment de simples magiciens pourraient-ils faire le poids face à l'incarnation même de la magie ?
Ma chronique : Un sacré bestiau ! Voilà ce que je me suis dit, l'eau à la bouche, en recevant ce troisième et dernier tome tant attendu. J'en étais persuadée, ce volume final serait une réussite, une véritable apothéose. La cerise sur un gâteau déjà délicieux. Hélas, tout ne s'est pas passé comme prévu, et j'ai rapidement déchanté. Bien qu'il tienne certaines promesses, Shades of Light m'a déçue sur de nombreux points. Une bien triste façon de clôturer cette saga.
Le Londres rouge est en liesse. L'Essen Tasch est terminé, Alucard Emery couronné champion et les festivités battent leur plein - tant en ville qu'au palais royal. Inconscients du danger qui les guette, dirigeants, participants et spectateurs se laissent emporter par l'ivresse de la nuit. Mais en toute discrétion, l'impossible survient : Holland, l'Antari blanc laissé pour mort dans le Londres noir voici plusieurs mois, est de retour. Mais il n'est plus lui-même. Osaron, magie incarnée et roi des ombres, a pris possession de son corps et déferle sur le royaume d'Arnes. Davantage que le royaume des Maresh, c'est le monde rouge et ses voisins blanc et gris qui sont menacés. Démunis face à sa puissance dévastatrice, les sujets du roi Maresh n'ont d'autre choix que de se retrancher dans le palais écarlate tandis qu'au dehors la population succombe à un mystérieux brouillard. Une vie après l'autre, Osaron se constitue une armée digne de lui, et Kell et Lila savent que le temps presse. La course pour la vie a commencé, et la force brute ne suffira pas à leur assurer la victoire. Pour vaincre, il leur faudra se trouver d'improbables alliés, et mettre la main sur des artefacts de légende... mais sont-ils prêts à en payer le prix ?
De l'eau a coulé sous les ponts depuis ma lecture des deux premiers tomes de Shades of Magic. Beaucoup d'eau. Et si à l'époque j'avais été ravie de plonger dans cet univers simple mais non moins époustouflant, je dois bien avouer que ce coup-ci, j'ai bu la tasse. C'est que d'emblée, l'eau s'est avérée glaciale. Victoria E. Schwab, qui clôturait le second volume de cette saga sur un cliff-hanger à la limite du supportable pour les pauvres lecteurs que nous sommes, a choisi de débuter son troisième volume sur les chapeau de roues. Soit, je n'ai rien contre ce dynamisme féroce d'entrée de jeu - je l'apprécie même plutôt bien. Mais là où ça a coincé, c'est que Shades of Light commence exactement là où Shades of Shadows s'arrête, et pour partir au quart de tour. On pourrait les mettre bout à bout sans même avoir l'impression de passer d'un volume à un autre ; ni même d'un chapitre au suivant. Une continuité si lisse et rectiligne qu'elle m'a donné l'impression d'avoir fait les frais d'une mauvaise exigence éditoriale. Vous savez, quand les maisons d'édition - francophones, pour la plupart, décident de couper en deux (et n'importe où) un même volume pour en faire deux (ça se vend mieux, paraît-il ...) ? Hé bien Shades of Light m'a fait le même effet. Certes, on est directement replongés dans l'univers de Lila et Kell, mais bien trop brusquement, sans transition ni finesse. En bref, ça démarrait plutôt mal.
Malheureusement, plutôt que de rectifier le tir, les choses se sont gâtées. La faute à Victoria E. Schwab et à sa gestion catastrophique des révélations. Si vous avez lu les deux premiers tomes, vous savez comme moi que Lila Bard est bien plus qu'il n'y parait. Et si pour le lecteur sa véritable nature ne fait aucun doute - l'autrice sème tout de même des indices gros comme des gratte-ciels - les protagonistes de son récit, eux, demeurent bien entendu dans l’ignorance la plus totale. Ainsi, quand la lumière se fait finalement sur Lila, on est en droit de s'attendre à de la surprise de la part de ces derniers, à de la passion, presque. Pourtant, la révélation passe comme une lettre à la poste, chez tout le monde. Comme si ça coulait de soi. Le lecteur s'attend pendant deux tomes à un retournement fracassant, marquant durablement chacun des esprits du récit ... pour au final se retrouver face à un flop retentissant et à des protagonistes qui s'apostrophent à grand coups de : «Tu le savais, toi ? » « Ben oui, je le savais. Pas toi ?» «Ben non.» «Ah.» . Même constat pour la romance Lila-Kell qui se concrétise enfin ici. Nul feu d'artifice, ni scènes d'anthologie, rien que de l'attendu et de la non-surprise anesthésiante.
Mais là où le coup de grâce m'a été porté, c'est lorsqu'il a été question du moyen de défaire Osaron. Sans mentir, je me suis sur le moment crue dans une parodie de mauvaise Fantasy. Vous savez, quand les héros découvrent comme par magie, sortis de strictement nulle part les artefacts parfaits pour battre le méchant - et dont on n'avait naturellement jamais entendu parler avant ? Hé bien Victoria E. Schwab a joué cette carte-là, sans complexe et à plusieurs reprises dans son récit. De quoi me refroidir encore plus que ce que je n'étais déjà, et décrédibiliser un univers jusque là impeccable. Pourtant, si la chasse aux artefacts parait réchauffée, elle finit malgré tout par s'intégrer efficacement à l'intrigue, et instaure un rythme certain au récit, sans aucun temps mort. J'avoue m'être laissée prendre au jeu.
Shades of Light n'est en vérité pas un flop, juste une grande déception ; et c'est le personnage de Holland, dont j'ai appris a découvrir de nouvelles facettes, qui a sauvé les meubles. Sans nuance dans le premier tome, le second lui permet de révéler ses motivations et de se faire une petite place dans le cœur du lecteur. Mais dans ce troisième volume, c'est de la vie de Holland qu'il est question. Des épreuves qu'il a traversées et qui l'ont forgé, dures et froides comme son monde d'origine ; et qu'il traverse d'ailleurs toujours dans Shades of Light, en compagnie du lecteur. A l'image d'un Severus Rogue, lui a donc obtenu mon respect et ma sympathie - bien plus que Kell et Lila n'avaient réussi à le faire. Lila à cause de son caractère hautain et constamment querelleur ; et Kell pour son manque de relief - du moins dans ce troisième tome. Alucard Emery, à l'image de Holland, a en ce qui le concerne poursuivi sur sa lancée et fait partie de ces protagonistes qui relèvent la sauce plutôt que de la plomber. Un protagoniste charmant et charmeur, comme j'en rencontre peu !
Avec tant de protagonistes au passé commun, les étincelles étaient garanties ; et si les querelles et règlements de comptes sont effectivement fréquents dans Shades of Light, j'ai été déçue de constater que Victoria E. Schwab n'ait pas choisi d'aller plus loin dans son traitement du pardon. Mis à part quelques avancées et concessions, les mains tendues à d'anciens ennemis demeurent rares, du moins trop à mon goût. Et quand le lecteur pense avoir été témoin d'une réconciliation, l'autrice lui démontre dans le chapitre suivant que ce n'était pas le cas. De quoi faire tourner en bourrique le lecteur et regretter un poil de maturité chez les protagonistes - Kell et Alucard les premiers. Les querelles d'amoureux (façon de parler, hein... mieux vaut préciser avec Alucard ! ), ça fonctionne cinquante pages, mais après ça lasse. Et là, Victoria E. Schwab lasse beaucoup à force de répétitions.
Shades of Light n'est donc pas une réussite - du moins pas celle que j'espérais. Mais ce n'est pas un raté non plus. Disons qu'il ira s'inscrire dans ces récits que l'on regrette, qui attristent un peu ; sur lesquels, peut-être, on avait trop misé à force d'attente et d'espérances.
Note : 14/20
Date : 23 octobre 2018 - 28 octobre 2018
Cette saga me fait très envie !
RépondreSupprimerOn n'est pas d'accord sur tous les points, mais on l'est sur le sentiment général de déception.
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