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  • 15 sept. 2018

    Le dieu oiseau de Aurélie Wellenstein

    Auteur : Aurélie Wellenstein
    Éditeur : Scrinéo (2018)
    Genre : Dark fantasy
    Pages : 333 pages (grand format)

    Lu dans le cadre du « Pumpkin Autumn Challenge »

    Le résumé : Une île. Dix clans. Tous les dix ans, une compétition détermine quel clan va dominer l'île pour la décennie à venir. Les perdants subiront la tradition du " banquet " : une journée d'orgie où les vainqueurs peuvent réduire en esclavage, tuer, violer, et même dévorer leurs adversaires. Il y a dix ans, Faolan, fils du chef de clan déchu, a assisté au massacre de sa famille. Sauvé par le fils du chef victorieux, Torok, il est depuis lors son esclave et doit subir ses fantaisies perverses. Enfin, la nouvelle compétition est sur le point de commencer. L'occasion pour Faolan de prendre sa revanche. Sa vengeance aura-t-elle le goût du sang ?


    Ma chronique : Le dieu oiseau est le second roman que je lis d'Aurélie Wellenstein. Peu convaincue par Le roi des fauves, c'est avec un sérieux a priori que j'ai entamé ma lecture de celui-ci. Et bien que d'ordinaire je me méfie des a priori (même des miens - et surtout des miens, en fait), force est de constater que j'ai eu raison de rester un minimum sur mes gardes. Le dieu oiseau n'est pas du tout un mauvais roman, il est même assez bon ; mais il a ses défauts. Une lecture en demi-teinte, donc, mais une autrice que je pense continuer à suivre malgré tout, car son charme opère plutôt bien.

    Il y a dix ans, Faolan a tout perdu. Sa famille, son clan, sa liberté. Son humanité. Il y a dix ans, le champion du clan du Bras de fer a dominé les autres lors la Quête de l'homme oiseau. Élu par Mahoké, le dieu oiseau, le Bras de fer a déferlé sur l'île et, selon la tradition, s'y est adonné au Banquet. Des bébés dévorés devant leur mère, des hommes empalés vifs, des femmes et des fillettes violées puis tuées, et des enfants rescapés asservis. Faolan fait partie de ces derniers. Esclave de Torok, fils du champion du Bras de fer, voilà dix ans qu'il subit en silence les pires sévices. Mais le vent tourne, et les sélectifs pour la prochaine Quête approchent. Face à des concurrents entraînés depuis la naissance, Faolan ne pèse pas bien lourd, mais peu lui importe. ll a soif de vengeance compte bien être celui qui, cette année, mènera le Banquet. Les épreuves se dressent devant lui et l'assaillent de toutes part. Parviendra-t-il à mener sa vengeance à bien ?

    Aurélie Wellenstein est une autrice que j'ai rencontrée au salon Trolls et Légendes il y a un peu moins de deux ans. C'est à cette occasion que je me suis lancée sur Le roi des fauves, et même si ma lecture n'a pas été sans accrocs, j'ai été bluffée par l'imagination de cette autrice. Forcément, je me devais de remettre le couvert avec Le dieu oiseau. Et au terme de ma lecture, même constat qu'auparavant: une imagination fertile, prompte à construire des univers très sombres, mais qui malheureusement manquent de punch. Résumé à l'appui, Le dieu oiseau revendique une bestialité crue ; or, à la lecture, il apparaît clairement qu'Aurélie Wellenstein n'assume pas cette violence. Elle épargne son lecteur à de nombreuses reprises, se répète et élude quantité de points certes pénibles à aborder, mais essentiels pour que son récit tienne la route.  Elle vend au lecteur un récit d'une sauvagerie presque insoutenable ; mais dans les faits, le voilà qui se retrouve avec un ouvrage de dark-fantasy lambda, pas plus insoutenable, d'ailleurs, qu'un thriller quelconque.

    A titre d'exemple, le lecteur n'en saura jamais vraiment beaucoup au sujet des sévices psychologiques subits par Faolan, pourtant d'une importance capitale dans sa relation à Torok et, surtout, dans son évolution.

    Et Torok, justement, est un personnage que j'ai beaucoup apprécié ; certainement même plus que Faolan. Tel un marionnettiste tirant les ficelles d'un pantin, Torok se plaît à diriger ce dernier et à poser sa marque indélébile en lui, dans ses chairs et son esprit. Un personnage que le lecteur devine complexe, paradoxalement tiraillé entre sa volonté de briser et de torturer, et celle de nouer une certaine complicité avec sa victime qui, en retour, oscille entre haine et amour (vous avez dit syndrome de Stockholm ?). Un aspect qui aurait mérité d'être davantage travaillé, car susceptible de nourrir l'intrigue et de lui faire atteindre des sommets. Faolan, de son côté, évolue beaucoup. Son personnage n'est pas figé, et sa quête de vengeance a tôt fait de se muer en quête identitaire. N'appartenant à aucun clan, il lui faut trouver sa place et, au-delà de la vengeance dont il rêve, trouver une raison, une bonne, de vivre. Dommage cependant que son évolution soit si linéaire et prévisible. En bref, des personnages plus qu'intéressants, mais hélas sous-exploités. On en reste sur sa faim.

    En ce qui le concerne, le scénario est plutôt bien pensé. La première centaine de pages plante efficacement le décor et permet au lecteur de se familiariser avec les coutumes de l'Île, résolument inspirées de la culture aztèque, tandis que dès le second tiers du récit, la machine infernale de la Quête s'emballe. Malheureusement, sur près de cent cinquante pages, Aurélie Wellenstein ne propose rien d'autre qu'un Hunger Games revisité. Dix concurrents lâchés sur une île hostile, un seul vainqueur, des pièges mortels dissimulés çà et là, les plus bas instincts de chacun qui refont surface ... comment passer à côté ? Pourtant, l'idée n'est pas mauvaise, loin de là ; seulement l'autrice peine à y apposer sa patte et à faire la différence. Ceci dit, il faut reconnaître que malgré l'absence de personnalité sur cet aspect du roman, l'efficacité est là. Le lecteur est happé par cette chasse à l'homme en territoire sauvage et n'envisage pas une seconde de laisser tomber sa lectureMais quand il arrive à la fin, le lecteur peut être confus. L'autrice propose certes une chute surprenante et plutôt classieuse à son récit, mais côté conclusion générale, Aurélie Wellenstein ne convainc pas tout à fait. En y repensant, je suis incapable de dire si cette conclusion me plait ou non. Toujours est-il que j'en comprends le sens et le message, bien que j'aurais préféré une autre proposition de l'autrice

    Dans son ensemble, Le dieu oiseau est un bon récit, entaché  toutefois de quelques points noirs hélas récurrents chez l'autrice : Des protagonistes peu aboutis et pas suffisamment exploités ; et un univers prometteur mais manquant cruellement de punch et de profondeur. Malgré cela, Aurélie Wellenstein a pour elle bien des qualités, dont la noirceur de son imaginaire, et bien des pistes d'évolution prometteuses. Si la Fantasy est votre dada (ou pas d'ailleurs), que vous avez le cœur bien accroché et un goût certain pour l'hémoglobine, tentez Le dieu oiseau. A défaut de révolutionner le genre, il vous fera passer un moment de lecture agréable - façon de parler.

    Note : 15/20

    Date : 12 septembre 2018 - 14 septembre 2018

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