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  • 2 mars 2019

    L'Empire du Léopard de Emmanuel Chastellière - En pays (in)conquis

     Auteur : Emmanuel Chastellière
    Éditeur : Critic
    Genre : Gunpowder Fantasy
    Pages : 626 (grand format)


    Le résumé : 1870. Après une épuisante campagne militaire, le royaume du Coronado a conquis l'essentiel de la péninsule de la Lune-d'Or. Seul l'empire du Léopard, perdu dans les montagnes, lui résiste encore. Dans l'attente des renforts promis par sa hiérarchie, le colonel Cérès Orkatz - surnommée la Salamandre - peine à assurer l'ordre sur place, la faute à un vice-roi bien intentionné mais trop faible. Dans ce monde de jungles et de brume, les colons venus faire fortune s'épuisent et meurent à petit feu, même si certains au sein du régiment espèrent toujours découvrir la mythique cité de Tichgu, qui abriterait selon les légendes locales la fontaine de Jouvence. Alors qu'une éclipse lunaire sans pareille approche, Cérès va devoir tenter d'assurer la survie de ses hommes, au mépris peut-être de ses allégeances...


    Ma chronique : Si comme moi vous êtes un inconditionnel des éditions Critic qui passe des heures par semaine à errer sur la blogosphère, L'Empire du Léopard, vous n'avez pas pu passer à côté. Depuis sa sortie les chroniques élogieuses fleurissent comme des pâquerettes un jour de printemps, et avec le beau temps qui s'en revient je me suis dit que c'était à mon tour de m'y coller - pas trop tôt me direz-vous. Enfin «m'y coller», façon de parler, car comme les chroniques que j'avais déjà pu en lire l'annonçaient, L'Empire du Léopard s'est révélé envoyer du lourd. Que les lecteurs en mal d'originalité à qui les longueurs ne font pas peur jettent leur dévolu sur ce roman : il est taillé pour surprendre et dépayser.

    Les rêves de grandeur de l'empire du Coronado l'ont amené à coloniser les terres de la Lune d'Or par delà l'immensité de la Grande Mer. En quête d'or et de richesses, c'est finalement un pays stérile, pauvre en minerai et aux conditions de vie terriblement rudes que découvrent les colons, ainsi qu'un peuple d'indigènes hostile et fermement opposé à l'envahisseur. Six ans plus tard, bien que vaincus, les indigènes continuent à lutter farouchement face aux troupes du Coronado dirigées d'une main de fer par le célèbre colonel Cérès Orkatz. Mais les soldats sont usés, sur les nerfs, et l'indifférence du Coronado à leur égard les révolte peu à peu. D'autant que là-haut dans les montagnes demeure un peuple jamais conquis : celui de l'Empire du Léopard, si prospère et puissant qu'il vainquît autrefois les terribles «fées» - détentrices d'un pouvoir que certains convoitent toujours aujourd'hui. 

    Emmanuel Chastellière était jusqu'à ce jour inconnu à mon bataillon. Traducteur, auteur, co-fondateur et rédacteur en chef du site Elkabin spécialisé en Fantasy, le bonhomme a de quoi impressionner sur papier, et pas qu'avec son C.V. Parce qu'avant toute chose c'est évidemment L'Empire du Léopard qui m'en a mis plein les yeux - de quoi avoir envie de découvrir ce qui se cache dans le giron du gaillard.

    Dès les premières pages - et même dès la couverture, en fait - , le ton est donné : L'Empire du Léopard sera un roman d'inspiration coloniale centre-américaine, ou ne sera pasEt je dis bien d'inspiration, car en dépit des civilisations dépeintes qui rappellent immanquablement celles des Mayas et des Aztèques et quelques détails topographiques qui situent le récit dans une région rappelant, elle, le Mexique et la péninsule du Yucatán (quand ce n'est pas une référence au Machu Picchu qui se cache derrière l'inaccessibilité de la capitale de l'Empire du Léopard), le récit se place résolument dans un cadre imaginaire... et pas que du côté des indigènes. Le Coronado, en effet, cligne sévèrement de l’œil du côté de l'Espagne et de ses conquistadors, à la différence que les Espagnols n'avaient pas la chance d'être aussi bien équipés que les soldats du Coronado.

    Fusils à baïonnette, carabines, pistolets ... Chastellière craque même le Gatling et fait de son récit l'un des rares représentants francophones de la Gunpowder Fantasy (ou Fantasy à poudre pour les moins english d'entre nous). Si vous êtes familier au blog, vous savez que les sous-genres, j'en fais jamais grand cas dans mes articles. Mais si je prends la peine de le préciser pour une fois ici, c'est que ça a de l'importance. Une sacrée importance, même, puisque la campagne militaire du Coronado au sein de la Lune d'Or et alentours est le point central de l'intrigue. Et pas besoin de vous faire un dessin : avec des soldats armés jusqu'aux dents de fusils et autres joyeusetés à poudre, les échauffourées prennent une toute autre dimension que ce à quoi la Fantasy plus classique, d'inspiration médiévale, nous a habitués. Un frein pour les puristes, une aubaine pour tous les autres.


    Bref, les lieux dépaysent tout autant que l'armement et l'allure des colons, et ça sent bon la moiteur, le sacrifice humain et la poudre. Un coup de frais bienvenu dans un genre qui justement appelle au renouveau constant.

    Une inspiration exotique reconnaissable entre mille, donc, et qui apporte avec elle sa soif de magie et de légendes. Et c'est là que j'attaque avec mes petits regrets. L'Empire du Léopard cause magie et même alchimie, les deux s'intègrent très bien dans l'univers du roman, mais côté développement c'est le néant total. « L'alchimie ? T'occupe, t'as pas besoin de savoir. La magie ? Tracasse, l'essentiel c'est qu'il y en a et qu'elle vende du rêve ». Certes on entretient le mystère, mais à titre personnel ça m'a clairement laissée sur ma faim. Six cent pages étaient largement suffisantes pour caler deux ou trois explications, mais non. A la place, des longueurs à n'en plus finir et - je n'en reviens pas de dire ça - des personnages à la psychologie trop travaillée qui bouffent l’entièreté du roman, exception faite du sprint final. Ouais, parce que la fin, elle envoie sévèrement du pâté et vous réconcilie avec tout le reste. Ça bouge en tous sens, c'est diaboliquement bien écrit et à l'image de l'entièreté du roman, c'est d'un doux-amer jubilatoire

    Mais malgré les longueurs qu'ils occasionnent, les personnages de L'Empire du Léopard sont vraiment bons. Qu'ils soient citoyens de l'Empire ou du Coronado, aucun n'est un enfant de chœur, tous ont du sang sur les mains et bas les masques ! Emmanuel Chastellière ne cherche pas à nous les rendre particulièrement sympathiques ; il les décrit, les décortique les uns après les autres et c'est tout. Deux femmes se disputent la narration (un autre bon point), mais à travers elles c'est l'ensemble de la colonie qu'on passe au crible. Tout est en nuances de gris, jusqu'à cette fin dont j'ai déjà parlé. Cette volonté de ne faire de personne des bons ou des mauvais, juste des Hommes, j'aime beaucoup ; tout comme j'ai accroché à la pudeur touchante de la relation Cérès-Camellia.


    Cérès n'est pas une héroïne mais une conquérante ; un envahisseur austère qu'on aime suivre sur le chemin de la reddition d'un Empire prospère résolu à vive en paix. Quoi qu'il en coûte.

    En bref L'Empire du Léopard fut une bonne lecture. Peut-être avec trop de longueurs à mon goût, un travail des personnages excessif et un problème dans la gestion de l'alchimie et de la magie, mais une belle découverte quand même. Exotique, rythmée aux coups des fusils ; voilà qui donne envie d'en découvrir plus dans le genre Gunpowder. Si vous avez des titres, je suis preneuse, car j'espère remettre ça un jour !


    Note : 16/20

    Date :  24 février 2019 - 01 mars 2019

    5 commentaires:

    1. Il me tente bien celui ci, d'ailleurs je l'avais reçu dans un concours !
      (oui j'ai eu de la chance xD)

      Le fait que ça soit hyper détaillé en général ne me gêne pas. Mais en même temps on ne peux pas faire de généralité, ça dépend vraiment de si j'accroche au reste ou pas xD

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      1. Effectivement, une belle chance que tu as eue là :-D ! C'est détaillé mais finalement le contexte fait que ça passe sans trop de mal (comme je le dit, c'est plutôt de l'ordre du "petit regret"). J'ai été scotchée à ce roman de A à Z pour tout te dire. J'espère que tu le liras bientôt, je me demande ce que tu en penseras :p !

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    2. Merci pour la chronique ! :)
      (Il y a peu (et pas "pas" à mon sens ;)) d'explications sur l'alchimie car elle est globalement censée se baser sur celle que l'on a connue.) :)

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      1. C'était avec grand plaisir, tout comme ma lecture ! J'espère remettre bientôt ça avec "Célestopol" dont j'ai entendu beaucoup de bien également ! ^^

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      2. Plus que deux mois à attendre. ^^
        J'espère que le recueil vous plaira alors !

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