23 juin 2019

L'exorciste de William Peter Blatty - Balance ton démon !

Auteur : William Peter Blatty
Éditeur : Pavillons Poche
Genre : Fantastique, Horreur
Pages : 529 (format poche)

Lu dans le cadre du « Hold my SFFF Challenge »

Le résumé : Des bruits insolites, des meubles qui se déplacent dans la nuit et le comportement de plus en plus mystérieux d'une enfant de douze ans, fille d'une célèbre actrice, que nul médecin, nul psychiatre, ni aucune analyse ne parvient à éclaircir... Lorsque la situation s'aggrave, il ne reste qu'à tenter l'exorcisme. 



Ma chronique : Des monstres et des créatures diaboliques, c'est ce après quoi je courrais en ce mois de juin - participation au « Hold my SFFF Challenge » oblige. Après un tour rapide de ma PAL, le doute n'était pas permis : ma première victime du challenge, ce serait L'exorciste de William Peter Blatty. Le grand, le beau, le très connu Exorciste adapté pour le grand écran en 1973 ; celui-là même ! Un vrai plaisir que d'avoir lu ce classique et un véritable must sur mes étagères ~ même si *hum* y a quand même eu de la flipette au rendez-vous, j'avoue.

Difficile d'être plus connue sur le boulevard hollywoodien que Chris McNeil. Actrice de renom et metteuse en scène en devenir, c'est toutefois dans son rôle de mère aimante que la préfèrent les paparazzis à ses trousses. Et pour cause : elle et Regan, sa fille, forment le duo mère-fille de rêve et si ce n'était l'absence du père de la fillette, le tableau de famille serait parfait. Hélas la tranquillité de leur quotidien bascule lorsque que le comportement de Regan change insidieusement et que leur maison devient le théâtre de manifestations étranges. Des disparitions inexpliquées, des coups fantômes portés sur les murs, des objets en lévitation ... et Regan, la douce Regan, dont une nouvelle personnalité émerge, obscène, malfaisante, démoniaque. Les généralistes se succèdent, les psychiatres suivent sans que personne ne parvienne à établir de diagnostic ferme. A bout de forces et de désespoir, Chris se tourne vers la seule explication qui lui reste ... et la solution qui va de pair : l'exorcisme.

Même pas peur ! Ha, c'est ce que j'aurais aimé vous dire, sauf que non. Moi pas mentir, en lisant L'exorciste il y a clairement des passages qui m'ont collé la frousse et la chair de poule qui va avec. Le genre de pressentiment morbide qui vous suggère de vous retourner juste pour voir s'il y a quelque chose qui vous guette depuis l'ombre, le genre d'impératif angoissant qui vous donne envie d'aller aux toilettes en pleine nuit, mais accompagné : tout ça, ce roman vous l'envoie en pleine face et cristallise le tout au fin fond d'un cerveau reptilien qui, pour le coup, s'éveille plus que de raison et vous en fera voir des vertes et des pas mûres à toute heure du jour et de la nuit - mais la nuit surtout.

Pourtant, surprise, point de scènes à la gratuité dérangeante dans ce roman. Pas de clou glauque enfoncé plus que de raison, mais à la place une parcimonie redoutable distillée dans une once de rationalité à toute épreuve ; et grand bien en a pris à William P. Blatty ! Car ce qui fait plaisir dans L'exorciste, ce qui rend ce roman difficile à lâcher, ce n'est pas tant de suivre la longue et terrifiante dégénérescence de Regan - pour qui me prenez-vous, cruels gens ? - mais d'observer avec quel professionnalisme médecins et psychiatres se penchent sur les tourments de la fillette et jettent une lumière nouvelle sur les cas de possessions. On en apprend des tonnes sur la force de l'inconscient, sur ce maelström qu'on couve tous dans notre caboche et jusqu'au bout - oui, jusqu'au bout - on ignore sur quel pied danser. Possession ou hystérie ? Telle est la question et c'est un régal de voir les éléments abonder tantôt dans un sens, tantôt dans un autre, ainsi que de découvrir en prime une Eglise frileuse et - oserais-je le dire ? - progressiste sur la question de l'exorcisme.

Le cerveau de l'instinct animal, de la survie à tout prix et de la peur à l'état brut bataille ferme contre celui de la rationalité et du bon-sens, et le combat signé de la plume de William P. Blatty fait plaisir à lire !

Allez, je sens que je peux maintenant vous l'avouer, je n'ai jamais vu le film. Ce n'est pourtant pas faute d'être adepte de l'horreur, mais disons que les films datés, c'est pas mon truc. Parcourir le roman, par contre, ça m'a tout de suite tenté et vous savez à présent que la déception n'était pas de la partie. Son titre de classique littéraire et cinématographique, L'exorciste ne l'a clairement pas volé et on sent même que l'oeuvre a très, très, très largement inspiré le genre. L'univers Conjuring en prend à mes yeux un sacré coup - du déjà vu pour la plupart - mais dans la foulée c'est ma curiosité qui a pris le plus cher, et dans le bon sens du terme. Quid des autres classiques comme Rosemary's baby ? Quid des œuvres littéraires de l'ombre dont on ramasse aujourd'hui les miettes mais qui peinent à ré-émerger ? Il y a matière à aller creuser de leur côté plutôt qu'à ré-inventer le fil à couper le beurre, et j'espère avoir l'occasion d'y porter davantage d'intérêt à l'avenir - l'envie, elle, est déjà là !

Dernier bon point en faveur de William P. Blatty : sa plume. Si on a sans doute du mal au début à se faire à ce style clinique et presque chirurgical, jamais dans le détail mais toujours factuel et dirigé droit vers son but, une fois l'affaire lancée, on ne s'arrête plus. Ce qui apparaissait comme une faiblesse pour nous, braves lecteurs du XXIe siècle, devient très vite un vrai plus s'accordant à merveille avec le propos du roman. Possession ou trouble psychologique extrême, les deux sont savamment documentés et détaillés, mais surtout intégrés au récit efficacement grâce à un style qui ne s'embarrasse pas de broutilles et ne fait pas de manières. Le résultat est sans appel : on est happé immédiatement et la machine infernale du « Allez, encore un chapitre puis j'éteins » s'abat sur nous.

Horreur, malheur !, pour un moment diabolique avec un classique du genre, craquez pour L'exorciste, vous ne serez pas déçus. Il vous faudra par contre apprécier crachats et dégueulis ... mais ça, c'est une autre histoire.

Note : 17/20

Date :   19 juin 2019 - 22 juin 2019

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