10 févr. 2019

Shikanoko, tomes 3 et 4 (fin) de Lian Hearn - Japon fatal


Auteur : Lian Hearn
Éditeur : Gallimard (2017)
Genre : Fantasy
Pages : 284 et 307 (grands formats)

Le résumé du troisième tome : Shikanoko, le guerrier au masque de cerf, vit désormais retiré dans le Bois Obscur, pleurant la disparition de la Princesse de l'Automne. Livrés à eux-mêmes, les cinq garçons dont on lui avait confié l'éducation en profitent pour explorer l'étendue de leurs pouvoirs magiques... Hina doit aujourd'hui se cacher. Elle est placée sous la protection de dame Fuji, la maîtresse des bateaux de plaisir. Elle seule sait où se trouve le véritable empereur...

Ma chronique : Cette chronique, je m'y attaque clairement à reculons, un peu à l'image de la lecture de ces deux derniers volumes de Shikanoko. Deux années après avoir lu les tomes un et deux, je m'attendais à ce que la reprise de cette saga soit tendue, mais pas à ce point. Passer au travers de L'empereur invisible et de L'héritier de l'arc-en-ciel fut pour moi une épreuve titanesque et j'espère qu'après cette chronique, vous aurez saisi pourquoi. Trêve de teasing, faites vos bagages, c'est pour le Japon qu'on décolle.

Le clan des Miboshi est parvenu au terme d'indicibles massacres à mettre en déroute celui des Kakizuki, leurs ennemis de toujours. Sire Aritomo, seigneur de Minatogura et chef de clan des Miboshi, a assis le jeune Daigen sur le trône de jade après avoir évincé son légitime héritier - un sacrilège que ne lui pardonne pas le Ciel. Une sécheresse sans précédent s'empare du pays tandis que la famine ravage les campagnes, et l'ordre ne reviendra que si Yoshimori, l'empereur légitime, regagne son trône. Mais seule dame Hina, devenue dame de compagnie à bords de bateaux de plaisir, sait où se trouve le jeune Yoshi. Cependant, à elle seule, elle ne peut espérer parvenir à lui faire regagner la place qui lui revient de droit divin. Le guerrier cerf, Shikanoko, pourrait quant à lui faire toute la différence - si tant est qu'il décide de mettre un terme à son exil au Bois Obscur où il pleure toujours la Princesse de l'Automne et perd jour après jour un peu de son humanité. Sans compter sur ses cinq fils aux pouvoirs étranges, bien décidés à ne plus vivre dans l'ombre du Bois ...

A la lecture du résumé que je viens de vous rédiger, je suis plutôt fière de moi ; parce que côté compréhension de l'intrigue, c'était d'emblée mal engagé et très, très compliqué pour moi. Même en occultant le fait que j'ai lu ces tomes plus de deux ans après les deux premiers, comprendre de quoi il en retourne dans Shikanoko fut une galère de chaque instant, et la culture japonaise dans laquelle le récit baigne n'y est pas étrangère. Politiquement parlant, après assimilation globale de l'intrigue, on s'y retrouve sans trop de problèmes : les différentes factions belligérantes sont claires et leurs objectifs manifestes. Là où ça a été l'horreur totale, c'est au niveau des protagonistes et de leurs noms. Parmi la bonne trentaine de personnages qu'a crée Lian Hearn, tous à quelques trop rares exceptions près sont désignés sous au moins quatre noms différents, et aux consonances immensément similaires les unes aux autres. Je m'en suis pratiquement arraché les cheveux par touffes entières - et je m'en serai sincèrement bien passée.

Le deuxième gros point noir a été le style d'écriture de l'autrice, finalement très proche de celui qu'elle employait déjà dans Le clan des Otori - dont Shikanoko est le préquel. J'ai apprécié que les phrases soient simples, courtes, directes et aillent droit à l'essentiel. On ne s'embarrasse pas de figures de style inutiles et lourdaudes, et c’est tant mieux. Par contre, je ne pense pas avoir jamais vu de narration aussi impersonnelle. Le ton est distant, purement descriptif, jamais tourné vers l'introspection et éprouver en conséquence la moindre empathie pour les protagonistes est un combat perdu d'avance. Société nippone oblige, on pouvait certainement s'attendre à ton guindé et froid mais à ce point-là, je dis non tout net ; tout comme je dis non aux sauts de plusieurs semaines, mois voire années entre deux paragraphes ou chapitres successifs qui en rajoutent une couche côté impersonnalité du récit.

L'intrigue est narrée de façon carrée et expéditive, sans âme et sans la poésie qu'on aurait pourtant attendues d'un univers féodal nippon.

Je vous avoue donc de bon cœur avoir écourté mon malaise lors de ma lecture du quatrième tome - je n'en pouvais plus. Passée la moitié du récit, j'ai directement sauté aux trois derniers chapitres. Et là, pas de surprise. Les personnages finissent là où je m'attendais à les trouver, peut-être pas forcément ravis d'y être, mais là tout de même. La destination importe sans doute moins à Lian Hearn que le voyage en lui-même, mais pour moi qui n'ai pas du tout savouré ce dernier, c'était foutu. En tant que préquel au Clan des Otori, Shikanoko ne se défend pourtant pas trop mal, notamment grâce à des liens qui se dessinent tout au long de la saga et apparaissent enfin clairement au terme du quatrième volume. Les liens, j'aime ça, et quand bien même le récit ne m'a pas plu, on ne peut pas dire que l'ensemble est mal fichu.

Finalement, après lecture du Clan des Otori et de Shikanoko, il semble que Lian Hearn ne soit pas une autrice pour moi. J'aurais adoré venir à bout de cette dernière saga le sourire aux lèvres (d'autant que les deux premiers tomes n'étaient pas si mal), mais le déroulement du récit en a décidé autrement : tant pis. Au moins aurais-je fait un pas supplémentaire vers mon objectif de 2019 : clôturer/ avancer dans mes sagas. Amateurs de Fantasy nippone, cherchez peut-être ailleurs qu'ici un récit dans lequel vous impliquer corps et âme, vous seriez immédiatement refroidis.

Note : 9/20

Date : 04 février 2019 - 09 février 2019

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